L’essentiel sur l’ataxie équine : Causes, symptômes et gestion

Pattes de cheval en gros plan.

L’ataxie chez le cheval est un trouble neurologique complexe et souvent mal compris qui affecte la coordination et l’équilibre de l’animal. Cet état pathologique peut avoir des conséquences dévastatrices, non seulement sur la santé, le bien-être et l’avenir du cheval, mais aussi sur la sécurité de ceux qui l’entourent, propriétaire comme compagnons de pré. Dans cet article, nous vous décrivons les principaux symptômes qui doivent vous mettre la puce à l’oreille, ainsi que les causes (expliquées le plus simplement possible) qui peuvent provoquer ces lésions nerveuses. Nous verrons ensuite comment est établi le diagnostic par un vétérinaire et les traitements à l’heure actuelle. Enfin, nous terminerons par quelques mesures de prévention. C’est parti !

Comprendre l’ataxie chez le cheval

Définition et principaux symptômes

Même si de nombreux propriétaires ont tendance à dire de leur compagnon à quatre pattes que c’est un « cheval ataxique », en réalité, l’ataxie n’est pas une maladie en soi. Il s’agit en fait d’un trouble proprioception avec perte d’équilibre, causé par des lésions du système nerveux. On parlera donc plutôt d’un symptôme, symptôme qui résulte de diverses maladies ou origines traumatiques.

Concrètement, l’ataxie chez le cheval n’est pas toujours facile à identifier, car il existe différents degrés de gravité comme nous le verrons un peu plus loin dans cet article. Mais certains signes peuvent vous alerter :

  • modification de la posture générale et des membres (cheval à l’arrêt qui écarte exagérément ses membres pour se maintenir en position) ;
  • démarche anormale (cheval qui traîne des pieds ou qui les lève trop haut) ;
  • perte d’équilibre pouvant mener jusqu’à la chute ;
  • mouvements qui semblent maladroits (cheval qui trébuche souvent, qui a du mal à reculer en ligne droite, qui a des difficultés à se relever lorsqu’il est couché, etc.)…

Gardez en tête que seul le vétérinaire pourra confirmer (ou non !) le diagnostic.

Enfin, il existe deux types d’ataxies :

  • L’ataxie « symétrique » : le cheval chute des deux côtés, l’atteinte concerne les deux postérieurs ou les deux antérieurs.
  • L’ataxie « asymétrique » : le cheval chute préférentiellement d’un côté, l’atteinte est soit latérale soit diagonale.

Causes courantes de l’ataxie

L’ataxie chez le cheval peut avoir diverses causes, mais elles ont un point commun : le système nerveux est atteint. En général, ces dernières peuvent être classées en trois catégories :

  • les causes biologiques ;
  • les causes mécaniques ;
  • les causes traumatiques.

Les causes biologiques sont liées à une attaque du système nerveux par un agent extérieur. Cela peut inclure des infections virales, comme l’herpèsvirus de type 1, responsable de la rhinopneumonie forme neurologique, ou le « West Nile virus » ou « fièvre de West Nile », un virus transmis par des arthropodes piqueurs.

L’encéphalomyélite à protozoaire, peu répandue dans nos contrées européennes, peut également entraîner de l’ataxie. Dans cette maladie, les protozoaires, des parasites unicellulaires, cherchent à atteindre le système nerveux et le dégradent considérablement.

Enfin, parmi les autres causes biologiques, terminons par l’intoxication alimentaire (notamment avec le robinier ou faux acacia, les sèneçons et certains pesticides ou insecticides).

L’ataxie peut aussi être déclenchée par une compression de la moelle épinière au niveau des cervicales du cheval : ce sont les causes dites mécaniques. Cette compression perturbe le signal nerveux entre le cerveau, qui donne l’ordre, et les membres, qui exécutent le mouvement, entraînant une incoordination.

La gravité des signes dépend de la sévérité de ladite compression. De la compression ponctuelle uniquement dans certaines postures (souvent lorsque le cheval a la tête levée) à celle, intense, qui provoque des souffrances terribles et une paralysie complète des postérieurs (voire des antérieurs), tous les stades sont possibles.

Enfin, des causes traumatiques, comme des fractures cervicales ou des chutes entraînant des luxations de cervicales, peuvent engendrer des troubles locomoteurs importants, y compris l’ataxie.

Les différentes causes d’ataxie chez le cheval

Le syndrome de Wobbler

Le syndrome de Wobbler, aussi connu sous le terme de spondylomyélopathie cervicale équine et surnommé « mal de chien » (un comble pour une maladie équine !), est la principale cause de troubles d’ataxie chez les chevaux. Elle se caractérise par une instabilité des vertèbres cervicales qui réduit le diamètre du canal vertébral, comprimant ainsi la moelle épinière.

Cette instabilité cervicale est souvent due à une malformation congénitale, et même si tous les chevaux peuvent être des « Wobblers », le syndrome est plus observé chez certaines races : les Thoroughbred, les Quarter Horse et les Warmblood, et tout particulièrement les mâles.

Les premiers signes du trouble apparaissent généralement chez les jeunes chevaux pendant leur croissance, typiquement entre 1 et 2 ans. Ces symptômes sont aggravés lorsque la tête du cheval est relevée. Selon la sévérité de la compression, l’ataxie peut s’intensifier avec l’âge ou rester stable. Sans intervention, les perspectives pour une carrière sportive sont défavorables, et l’issue peut être fatale en fonction de la gravité des symptômes. Le diagnostic est confirmé grâce à une radiographie, par la mesure du canal vertébral.

Bon à savoir : il ne faut pas confondre syndrome de Wobbler et arthrose cervicale. Même si celle-ci entraîne des symptômes similaires, elle touche généralement les chevaux plus âgés.

Les virus

Parmi les virus qui provoquent de l’ataxie chez le cheval en France, citons la forme la plus courante et reconnue : la rhinopneumonie !

Variante neurologique causée par l’herpèsvirus de type 1 (EHV-1 pour les intimes), cette affection entraîne une inflammation du cerveau et de la moelle épinière. Elle se manifeste initialement par une légère ataxie qui s’intensifie progressivement, souvent accompagnée d’une fièvre élevée, d’une perte d’appétit et d’un grand abattement. Une petite semaine après le début des symptômes, le cheval touché se retrouve allongé et ne parvient plus à se relever. La récupération est très variable : certains n’en garderont que quelques séquelles quand d’autres devront être malheureusement euthanasiés.

Un autre virus, connu sous le nom de West Nile, est également responsable d’ataxie en France. Ce virus est principalement transmis par les moustiques et prédomine dans le sud du pays, en particulier en Camargue et dans les Pyrénées-Orientales.

Les symptômes initiaux, tels que la faiblesse et la fièvre, sont souvent négligés. Cependant, des signes neurologiques comme l’ataxie, des tremblements ou des changements comportementaux peuvent se développer quelques jours plus tard. Bien que certains chevaux puissent se rétablir en 20 à 30 jours, d’autres subissent une détérioration menant à la paralysie, au coma, voire au décès.

Les traumatismes

Réaction inflammatoire suite à une injection intramusculaire, abcès au cou, hématome profond, mais aussi fracture des cervicales… Les traumatismes localisés au niveau de l’encolure, donc près des vertèbres cervicales, peuvent engendrer de l’ataxie chez le cheval.

Diagnostic et options de traitement

Procédures de diagnostic clés

Il est crucial d’appeler votre vétérinaire dès que vous remarquez des signes de troubles mécaniques chez votre cheval. En effet, au-delà du risque pour vous (en cas de chute alors que vous êtes en selle !), plus les maladies entraînant l’ataxie sont prises tôt, plus les chances de guérison sont élevées.

Une fois sur place, le vétérinaire va réaliser un examen neurologique détaillé de votre cheval afin de confirmer ou d’infirmer l’ataxie, et d’évaluer son degré de sévérité :

  • Grade 1 : troubles légers, perceptibles uniquement dans certaines situations bien particulières (lors d’un demi-tour, un recul, sur un cercle serré) et par un professionnel de santé.
  • Grade 2 : troubles modérés et constants qui s’intensifient dans des conditions typiques.
  • Grade 3 : troubles clairement visibles en toutes circonstances, avec un risque accru de chute lors de mouvements spécifiques. Ce niveau est souvent vu comme le seuil où la sécurité du propriétaire et la survie du cheval sont compromises.
  • Grade 4 : altération sévère de l’état neurologique avec un risque élevé de chute inopinée.
  • Grade 5 : le cheval est couché et incapable de se relever sans aide.

Pour ce faire, le professionnel va suivre un certain nombre d’étapes :

  • L’observation à distance sans stimuli extérieurs : état général, degré de conscience, réactions par rapport à son environnement, postures au repos, présence d’une boiterie, etc.
  • L’examen clinique de base : présence de fièvre (mise en évidence d’une infection virale ou bactérienne), fréquence cardiaque et respiratoire, observation de la bouche et des pieds (mise en évidence d’un problème orthopédique et non neurologique), transit et fonction urinaire (repérage d’une incontinence), examen des nerfs crâniens (test d’olfaction, réflexe pupillaire, réponse à la menace, contrôle de la déglutition, etc.).
  • L’évaluation du système nerveux périphérique : observation et palpation des masses musculaires de l’encolure, réflexes cutanés, évaluation de la motricité, etc.

Bon à savoir : l’ataxie, même si elle est confirmée par un vétérinaire, n’est pas un vice rédhibitoire. Vous ne pourrez donc pas annuler une quelconque vente pour ce motif. En revanche, il est envisageable, sous certaines conditions , d’invoquer un vice caché rendant impropre l’usage du cheval auquel il était destiné au moment de l’achat (par exemple : un cheval de compétition).

Traitements disponibles et rééducation

Soigner l’ataxie est possible suivant son origine. Idem pour les séquelles neurologiques : certaines causes laissent apercevoir un avenir moins sombre que d’autres avec un espoir de guérison totale.

Concernant les ataxies d’origine biologique, les traitements diffèrent :

  • Pour les atteintes virales (rhinopneumonie ou West Nile) : les options thérapeutiques sont limitées et le pronostic est souvent défavorable. Les vétérinaires se concentrent sur le soutien de l’organisme pour combattre le virus. Le West Nile offre de meilleures chances que la rhinopneumonie. N’oubliez donc pas de faire vacciner votre cheval contre l’herpèsvirus de type 1 responsable de cette dernière !
  • Pour les intoxications : lavage d’estomac, drainants et perfusions peuvent sauver le cheval, à condition que la prise en charge soit rapide et que la quantité ingurgitée soit raisonnable. Mais si les symptômes apparaissent, le pronostic reste incertain.

Il en va de même pour les ataxies d’origine mécanique et traumatique dont les traitements disponibles dépendent entièrement de la cause première du symptôme :

  • Pour les inflammations traumatiques (suite à un choc ou une injection) : elles sont généralement bien traitées avec des anti-inflammatoires, voire un drainage pour les abcès, et se soignent très bien, atténuant rapidement et totalement l’ataxie.
  • Pour les fractures : le traitement et le pronostic dépendent de la gravité et du déplacement osseux. Les fractures simples peuvent guérir avec du repos et des anti-inflammatoires, mais les fractures complexes laissent peu de chance de survie à l’équidé.
  • Pour l’arthrose cervicale : l’ataxie peut être traitée avec efficacité grâce à des anti-inflammatoires, des corticoïdes ou des infiltrations lors des épisodes ponctuels.
  • Pour le syndrome de Wobbler : un dépistage précoce et un traitement adapté (travail limité, alimentation contrôlée, prise de corticoïdes) peuvent limiter la progression de la maladie. La chirurgie cervicale avancée peut être envisagée, mais elle est extrêmement coûteuse.

Enfin, l’ostéopathie peut être considérée comme un traitement, mais reste toujours controversée. Suivez donc les recommandations de votre vétérinaire malgré les « on dit » entendus dans les écuries.

Prévenir l’ataxie chez le cheval

Il est très difficile de prévenir l’ataxie chez le cheval au vu des causes multiples qui engendrent ce symptôme. Toutefois, voici quelques mesures à prendre qui pourraient vous permettre de limiter un maximum les risques :

  • Faites vacciner votre loulou contre l’herpèsvirus équin de type 1 (EHV-1). Et en cas d’infection dans vos écuries ou votre pension, demandez au gérant d’isoler très rapidement les équidés malades pour endiguer la propagation.
  • Proposer une alimentation équilibrée et adaptée aux besoins de votre compagnon à quatre pattes.
  • Offrez un environnement sûr à votre cheval. Le but est d’éviter les traumatismes.
  • Sachez reconnaître les plantes toxiques pour les équidés, notamment en balade !

Enfin, n’hésitez pas à faire de temps en temps de petits tests neurologiques pour détecter de manière précoce les premiers signes d’ataxie :

  • Exercez une légère pression sur le dos de votre cheval et assurez-vous qu’il n’y est pas d’affaissement.
  • Prêtez une attention toute particulière au moment du curetage des sabots. Votre cheval s’appuie-t-il (énormément) sur vous ?
  • Attrapez sa queue et tirez-la vers vous, du côté gauche puis du côté droit. Il devrait normalement opposer une résistance.
  • Incitez le cheval à reculer et demandez à un observateur extérieur de regarder s’il a tendance à traîner des pieds ou s’il a des difficultés de motricité.
  • Faites travailler votre cheval sur un cercle serré en longe et observez une quelconque maladresse ou allure étrange (jambe extérieure projetée de manière désordonnée, rotation de l’antérieur intérieur, etc.).
  • Faites passer un antérieur devant l’autre, posez-le et surveillez le temps que votre cheval met pour décroiser sa patte : plus c’est rapide, mieux c’est !

Bien évidemment, un seul de ces signes ne veut pas forcément dire que votre cheval est ataxique ! Mais s’il en cumule plusieurs, mieux vaut faire une petite vidéo régulièrement, comparez l’évolution de votre poilu et surtout les faire voir à votre vétérinaire !

Références

  • A. Giraudet – Clinique équine ENVA pour le Point Vétérinaire n° 144 du 01/10/2004 – « L’examen clinique d’une affection neurologique aiguë chez le cheval »
  • Pierre TRITZ et Agnès LEBLOND pour le RESPE (Réseau d’épidémio-surveillance en pathologie équine) – « Anomalies de la locomotion : syndrome neurologique ou pas ? – Bulletin n°39 »
  • RESPE (Réseau d’épidémio-surveillance en pathologie équine) – « Fièvre de West-Nile »
  • Institut Pasteur – « West Nile : informations et traitements »
  • L. Huot – Université Claude-Bernard Lyon 1 – « Les troubles de la démarche relevant d’affections autres que ostéo-articulaires chez le cheval »
  • T. Criquillion – Université de Liège Médecine vétérinaire – « Le syndrome de Wobbler : faut-il condamner le cheval ? »