Elle fait peur. Elle surprend les cavaliers débutants et expérimentés. Elle ne peut laisser que quelques bosses ou relever de la fracture. Mais dans tous les cas, que ce soit lors d’une balade tranquille ou pendant une compétition CSO intense, elle peut survenir à tout moment. Elle ? C’est la chute à cheval bien entendu ! Si de nombreux adages à son sujet sont martelés dans les clubs équestres (que celui qui n’a jamais entendu le fameux dicton « c’est le métier qui rentre » nous jette la première étrille), il n’en reste pas moins qu’il faut la connaitre pour mieux l’appréhender. Pourquoi tombons-nous de cheval ? Comment éviter les chutes et les blessures ? Que faire après un accident d’équitation et comment remonter en selle ? Nous répondons à toutes ces questions dans cet article.
Pourquoi tombons-nous de cheval ?
Les chutes ont généralement trois grandes causes.
En premier lieu, il y a ces chutes causées par un comportement imprévisible ou inapproprié de votre cheval. Il est « chaud » après plusieurs jours sans travail, il refuse un obstacle et pile net ou encore il prend peur et pivote brutalement pour échapper au « danger ». Ce dernier point est parmi les plus fréquents. Après tout, n’oublions pas que les chevaux n’ont peur que de deux choses : les choses qui bougent et les choses qui ne bougent pas.
Plus sérieusement, le moindre changement dans son environnement habituel (coucou les bottes de paille qui apparaissent après le fauchage !), le moindre mouvement interprété comme la présence d’un potentiel prédateur (les parapluies qui s’ouvrent, les poussettes ou les lézards qui déguerpissent dans les hautes herbes sont réputés pour manger les équidés) peuvent effrayer un cheval et le faire réagir promptement… et vous désarçonner ! Si vous êtes tombé, n’en prenez pas ombrage, mais il se peut tout simplement que vous n’étiez pas suffisamment vigilant ou que votre destrier n’était pas au bon niveau. On se rappellera toujours le proverbe « À jeune cavalier, vieux cheval ! »
Deuxième cause de chute : les erreurs du cavalier. Oui, cela arrive, même si ce n’est jamais agréable de l’admettre. Un manque d’assiette, une posture trop en avant ou trop en arrière, une jolie georgette à l’obstacle, des rênes trop souples alors que le cheval a besoin d’être encadré et hop ! vous voilà sur le sol de la carrière. Encore une fois, il s’agit ici, la plupart du temps, d’un déséquilibre entre le niveau du cavalier et celui de sa monture. Un bon moniteur d’équitation ne fera plus cette erreur et vous préconisera un autre cheval, plus adaptée.
Enfin, certaines chutes sont simplement dues à la malchance : votre compagnon à quatre pattes trébuche sur un sentier escarpé (ou dans la carrière pourtant parfaitement lissée — on connait tous un énergumène comme ça), il panache, votre sangle se casse et la selle tourne… Le côté imprévisible les rend malheureusement difficiles à éviter.
Les accidents d’équitation et leurs conséquences – études à l’appui
Il suffit d’écouter les cavaliers expérimentés pour prendre peur et ne plus jamais le pied à l’étrier : tous ont des histoires terribles de fractures et de traumatismes crâniens à n’en plus finir. Mais qu’en est-il réellement ? Qu’en disent les chiffres ?
Différentes études en France, mais également outre-Atlantique, nous donnent quelques informations objectives.
Dans l’Hexagone, environ 4 % des accidents de sport sont dus à l’équitation. Cela représente 6 000 personnes par an (et 7 décès annuels). Mais contrairement à d’autres activités physiques, ils comptent parmi les plus graves avec 30 % de fractures et 20 % d’hospitalisation. L’équitation est même considérée comme plus dangereuse que le ski, le football et… les sports motorisés ! Mais après tout, nous ne sommes pas seuls dans cette histoire : nous travaillons avec un être vivant, qui a son propre caractère et ses propres faiblesses.
Plus généralement, les accidents d’équitation sont sur le podium des accidents de la vie : en deuxième position après les collisions piétons/voitures. D’où l’intérêt d’avoir une bonne assurance responsabilité civile !
Concrètement, dans quasiment la moitié des cas (49 %), ce sont les membres qui sont touchés (pour 26 % les bras et pour 23 % les jambes) et qui présentent fractures, luxations et entorses. Et dans 37 % des cas, les blessures frappent le torse et le dos. Enfin, seulement 13,5 % des personnes ont été meurtries au niveau de l’abdomen.
Terminons par un dernier chiffre qui fait froid dans le dos : sur les 320 personnes qui sont décédées pendant une étude canadienne qui a duré 10 ans (!), 237 cavaliers ont reçu un choc à la tête et/ou au cou, soit 74 % ! En France, l’obligation du port du casque limite cette terrible statistique, même si certaines disciplines continuent à la bouder (randonnée, western, etc.).
Limiter les risques de chute à cheval
Si l’équitation parait bien dangereuse de prime abord, la crainte et la peur ne doivent pas prendre le dessus sur votre envie et votre passion ! Et pour cause, il est tout à fait possible d’éviter (autant que possible) de tomber de cheval. On vous livre nos meilleurs conseils de cavalier expérimenté dans cette partie.
La bonne attitude en selle
Nous l’avons vu précédemment, mais il est important d’avoir la monture la plus adaptée à votre niveau. Ne tentez pas d’apprivoiser un étalon fougueux si vous n’êtes jamais monté à cheval, de vous lancer au plein galop sur un petit jeune de 4 ans alors que vous venez de décrocher votre premier Galop… Ce sont des exemples tirés par les cheveux, pourtant, ils n’en restent pas moins porteurs de leçons. N’ayez pas honte de demander un cheval âgé, une « assurance vie » comme on les appelle en club, à votre moniteur si vous n’êtes pas aguerri.
Et à propos d’enseignement… Monter à cheval n’est pas inné. Cela s’apprend et faire appel à un coach ou un instructeur est impératif afin que vous vous sentiez le plus en sécurité possible (et que vous puissiez profiter un maximum, bien évidemment !).
Imaginons à présent que vous êtes en groupe. Deux attitudes sont importantes : ne vous éloignez pas trop (surtout en balade), car certains chevaux peuvent réagir vivement pour rattraper le reste du « troupeau ». Et à l’inverse, et notamment en carrière, ne collez pas l’arrière-train de celui de devant : une ruade est vite arrivée et votre cheval pourrait vous faire tomber afin d’esquiver le coup.
Parlons à présent posture ! Afin d’éviter les chutes à cheval, il est primordial de travailler un maximum votre équilibre et votre assiette. Tenez-vous correctement : suivant votre discipline (monte classique ou western), vous serez plus ou moins droit, sur vos ischions ou au contraire vraiment sur les fesses, les talons poussés vers le bas ou non. Une bonne posture vous aidera à rester sur votre selle même si votre compagnon s’emballe ou fait un mouvement brusque.
Parmi les gestes à connaitre, demandez à apprendre la rêne d’urgence (surtout si vous partez souvent en promenade), travailler la pression des cuisses (qui vous permet de rester en selle quoi qu’il se passe) en relâchant celle des mollets (si votre cheval est incontrôlable, le fait de serrer les mollets — souvent par peur — lui donne un ordre contradictoire puisqu’il l’incite à aller encore plus vite).
Enfin, dans les zones que vous ne connaissez pas ou sur les sols accidentés (forêts, champs, etc.), ralentissez : vous ne savez pas ce qui se cache (un trou dissimulé par les hautes herbes, une racine en travers du chemin, etc.).
Avoir un équipement et des vêtements adaptés
Commençons par l’essentiel, l’incontournable, l’obligatoire casque d’équitation, plus communément appelé bombe. Cet accessoire n’a d’accessoire que le nom : ne faites jamais l’impasse dessus, même si vous ramenez votre cheval au pré à cru après une séance particulièrement intense. Bien évidemment, il faut le choisir ajusté et certifié par un organisme de sécurité agréé.
Bon à savoir : en cas de chute ou de choc sur la tête, et même s’il semble toujours en excellent état, vous devez changer de casque. En effet, à l’intérieur, la mousse de protection peut avoir été endommagée et ne vous offrir qu’une maigre barrière contre une commotion cérébrale la prochaine fois que vous tomberez de cheval.
Passons maintenant aux protections dorsales et aux gilets airbag. Comme leur nom l’indique, ils sont là pour protéger votre colonne vertébrale avant tout. Si vous débutez ou que vous montez occasionnellement (= c’est-à-dire une fois par semaine, voire moins), vous pouvez opter pour une protection dorsale. Bien que moins couvrante, elle reste moins chère. Si au contraire, vous pratiquez régulièrement, que vous avez un bon niveau ou que vous suivez de nombreux entraînements à risques (saut d’obstacles par exemple), mieux vaut miser sur un gilet Airbag. Pensez simplement à bien décrocher la sangle de selle avant de descendre pour économiser vos cartouches !
Continuons notre tour des accessoires avec les chaussures. Suivant votre discipline, vous porterez soit des bottes d’équitation classiques, généralement en cuir à fermeture éclair, et bien ajustées, soit des bottes de western, plus lâches. Certains optent également pour des baskets, mais là attention : votre cheville doit toujours être maintenue et protégée. Exit donc les sneakers, et bonjour les chaussures de marche ou les baskets montantes !
Concernant les vêtements, ne portez rien de trop large ou avec des lanières qui pourraient se coincer dans les rênes ou dans votre selle. Mieux vaut éviter les shorts même s’il fait très chaud (à cause des frottements des cuisses contre le cuir brûlant) et privilégiez les pantalons longs d’équitation serrés ou en jean.
Savoir tomber en toute sécurité
Apprendre à chuter, c’est un exercice que tous les judokas et autres combattants pratiquent assidûment sur le tatami pour ne pas se blesser lors de leur sport favori. Si les cavaliers ont beaucoup moins de risque de tomber de cheval qu’eux, il peut malgré tout être intéressant de s’y mettre afin de développer de bons réflexes.
S’il n’y avait qu’une chose à retenir, ce sera celle-ci… En cas de chute à cheval, dégagez vos pieds des étriers, rentrez la tête d’un côté, menton contre la poitrine, croisez les bras contre votre torse et laissez-vous glisser en visant l’impact sur le dos de votre épaule. Et surtout, ne tendez pas vos bras devant vous. Fracture des poignets garantie !
Pas simple de penser à tout cela alors qu’un accident d’équitation va si vite. C’est pourquoi il est pertinent de s’entraîner régulièrement à chuter et c’est (relativement) simple : vous pouvez travailler directement dans le manège ou chez vous, sur un tapis de gymnastique.
Commençons par les chutes arrière. Tenez-vous accroupi, les bras autour de vos genoux, puis enroulez votre dos et laissez-vous doucement basculer en arrière puis revenez en position accroupi. Ce petit massage de la colonne vertébrale effectué plusieurs fois, passez à l’étape supérieure et répétez le même exercice, mais en vous inclinant légèrement d’un côté ou l’autre.
Pour les chutes avant, mettez-vous un genou à terre, les bras croisés sur votre torse et le menton rentré vers la poitrine. Puis roulez délicatement sur l’épaule opposée (si votre genou à terre est le gauche, roulez sur l’épaule droite). Normalement, vous atterrirez dans la même position. Alternez ensuite les mouvements.
Bien sûr, pour que ces mouvements s’ancrent dans votre mémoire musculaire, vous devez les pratiquer encore et encore !
Les bonnes réactions en cas de chute à cheval
Après une chute de cheval, il faut avoir les bons réflexes :
- Examinez-vous : avez-vous mal quelque part ? Pouvez-vous bouger tous vos membres ? Y a-t-il des saignements ?
- Rejoignez votre cheval et vérifiez son propre état de santé : est-il blessé ? Est-il calme (s’il s’est emballé) ?
- Checkez votre matériel : la selle et le filet sont-ils abîmés ? Les sangles sont-elles correctement attachées et réglées ?
Bien évidemment, si vous ne pouvez pas bouger ou si vous êtes blessé, contactez le 18 ou 15 (Pompiers ou Samu). Petit rappel : le 15, ce sont les urgences vitales !
Bon à savoir : vous êtes témoin d’un accident d’équitation et le cavalier est inconscient ? Ne retirez pas sa bombe et ne le bougez que lorsque les pompiers ou le médecin du Samu vous auront donné leur autorisation pour le mettre en position latérale de sécurité.
Si votre cheval est blessé, appelez un vétérinaire sans tarder et prévenez votre assurance cheval !
Bon à savoir : en cas de vomissements, de vertiges ou de malaise après une chute à cheval (même plusieurs heures ou jours après) et une réception sur la tête ou les cervicales, direction le médecin ! Ce peut être le signe d’un traumatisme crânien.
Tirer un apprentissage de ses chutes
La règle des « 100 chutes pour faire un bon cavalier » est-elle vraie ? Faut-il tomber pour que « le métier rentre » ? Eh bien, c’est un peu plus nuancé que cela !
Votre chute est due à une erreur de votre part ? Utilisez-la comme source d’apprentissage ! Essayez d’analyser votre chute, de comprendre ce qu’il s’est passé et ce que vous auriez pu/dû faire pour l’éviter. Si cela est trop flou, demandez à votre moniteur ou aux témoins. Et si vous avez une vidéo de votre cascade, c’est encore mieux (de nombreux parents d’élèves filment les péripéties de leurs cavaliers en herbe). Une fois que la situation a été analysée, il est temps de remonter à cheval et de refaire l’exercice en le simplifiant si cela est nécessaire. Par exemple, vous avez fait une georgette à l’obstacle face à un oxer impressionnant ? Passer par un vertical pour commencer peut être pertinent pour travailler votre équilibre, votre assiette et votre approche de l’obstacle.
Votre chute a été causée par votre cheval ? L’idée n’est pas de lui mettre toute la faute sur le dos, mais de comprendre ce qui s’est passé. C’est donc une excellente occasion de se pencher vers la théorie et l’éthologie. En appréhendant les origines de ce comportement « problématique », vous pourrez mieux anticiper les situations où il pourrait se reproduire, mais surtout vous pourrez le travailler, à pied notamment. Par exemple, votre cheval a eu peur d’un chien qui est apparu brutalement au croisement d’un sentier et vous a désarçonné en voulant prendre la fuite ? Ce sentiment de peur est lié à son instinct de proie. Une désensibilisation en plusieurs étapes est tout à fait à propos (combinée à une vigilance accrue durant les balades).
Après une chute de cheval, comment remonter à cheval ?
Terminons cet article par un sujet ô combien délicat : reprendre l’équitation après une chute de cheval, malgré la peur et l’appréhension. Même si tous les enseignants le martèlent : ce n’est pas forcément facile de se remettre en selle dès que l’on tombe !
Les conséquences physiques d’une chute de cheval
Nous l’avons vu avec le résultat de nombreuses études sur les accidents d’équitation : les blessures sont fréquentes et peuvent être graves, voire très graves. Si certains ne s’en tirent qu’avec une sensation d’étourdissement et quelques hématomes, d’autres font face à des entorses, des fractures ou des traumatismes crâniens. Et quand la douleur s’ajoute à la peur ressentie au moment de la chute, c’est là que débutent les conséquences psychologiques souvent passées sous silence ou minimisées par les professionnels du cheval et les autres cavaliers.
Les conséquences psychologiques
Les plus casse-cous sont capables de remonter à cheval en quelques secondes. Mais certains cavaliers sont plus timorés, échaudés par ce qui vient de se passer. Et même si tout le monde s’amuse du gâteau pour le prochain cours que vous allez devoir ramener, il semble n’y avoir qu’une chose qui compte : intérioriser ses émotions. Or, c’est tout l’inverse qu’il faut faire !
Avoir peur après une chute à cheval, c’est normal. Et vouloir la cacher ou en avoir honte ne va que renforcer une potentielle appréhension lorsque vous devrez enfourcher à nouveau votre monture. De nombreux cavaliers arrêtent totalement leur loisir favori après une chute. Ou ils évitent comme la peste les circonstances où ils ont perdu l’équilibre. Qui ne connait pas un cavalier qui ne jure que par le dressage après une grosse frayeur à l’obstacle ? Vous ne devez pas faire partie de ces gens, ce serait trop dommage !
En outre, n’oublions pas que les chevaux sont de véritables éponges à émotion. N’avez-vous jamais remarqué que certains équidés se tendent, s’agitent lorsqu’un cavalier stressé grimpe sur leur dos ? Pour qu’une confiance mutuelle règne, la gestion des émotions est impérative. C’est pourquoi vous devez aussi travailler sur vous et votre mental afin de reprendre l’équitation sereinement.
Remonter à cheval, un objectif impossible ?
J’ai peur à cheval depuis… Voilà des mots plus fréquemment prononcés que vous pourriez penser. C’est votre cas ? Rassurez-vous il est possible de dépasser cette inquiétude et de retrouver goût à l’équitation. La règle d’or : y aller en douceur !
Voici donc quelques conseils :
- Retournez dans un environnement équestre : revenez dans votre centre équestre, même si ce n’est pas l’heure de votre cours. Vous pouvez aussi opter pour une autre écurie, un stage dans votre région ou tout simplement près d’un paddock ou d’un champ. Le but est de retrouver les chevaux et pouvoir renouer avec l’animal sans penser à l’équitation en elle-même.
- Travaillez à pied : monter, c’est une chose, mais il existe une multitude de façons de s’occuper d’un cheval. N’hésitez pas à passer du temps avec lui, en main, en longe, en liberté. Promenez-le, parlez-lui, proposez-lui des exercices ludiques à pied. L’objectif est de retrouver votre complicité d’avant chute.
- Travaillez sur vous : dans certains cas, et notamment lors de chutes très graves, les cavaliers peuvent souffrir de stress post-traumatique. Il est alors primordial de se faire accompagner par un professionnel (l’EMDR fait des merveilles). Si vous n’en êtes pas à de telles extrémités, vous pouvez simplement lister les raisons qui vous ont poussé à commencer l’équitation, mais aussi tous les moments positifs que vous avez vécus à cheval afin de renouer avec votre passion.
- Reprenez en douceur en étant accompagné par un professionnel : lorsque vous vous sentirez prêt à remonter à cheval, allez-y progressivement et n’hésitez pas à vous superviser par un moniteur ou un coach si vous ne montez pas en club. Cela vous rassurera et vous permettra de reprendre confiance en vous, vos capacités, et en votre cheval. Et si vous n’êtes pas propriétaire, pourquoi ne pas demander un autre cheval pour repartir sur de bonnes bases ?
Et le plus important ? Se rappeler que tomber de cheval, c’est juste une façon de vérifier si la gravité fonctionne toujours.